Le 11 octobre dernier, Yseult accuse le clip DAMDADI (R.Tee feat. Soyeon) de plagiat dénonçant des scènes presque “copiées-collées” de son clip Bitch You Could Never. Une polémique qui réactive le débat sur la frontière entre inspiration et vol artistique dans l’industrie musicale.
La K-Pop : quand le phénomène danse entre hommage et contradictions
La K-Pop est souvent perçue comme l’enfant prodige de la pop mondiale : synchro parfaite, visuels léchés, millions de vues, collaborations internationales. Mais derrière cette façade ultra-lisse se cache une réalité plus nuancée : un genre musical profondément inspiré du hip-hop américain, mais confronté à ses propres limites culturelles notamment le colorisme et le manque de visibilité pour les artistes noirs. En 2025, avec la sortie de la série/clip K-Pop Demon Hunters, le phénomène a explosé : 236 millions de vues sur Netflix. Le moment est idéal pour s’interroger sur les racines, les influences et les contradictions du genre.
Des origines à l’appropriation
La K-Pop telle qu’on la connaît aujourd’hui ne sort pas de nulle part. Dès 1981, la Corée du Sud s’ouvre à l’Occident : le rap, le R&B, le rock commencent à circuler. Les premiers groupes de K-Pop apparaissent vers 1992. Mais l’essor réel arrive dans les années 2000 avec des mastodontes comme BTS, Blackpink, ou encore des groupes de 3ᵉ et 4ᵉ génération. Cependant, beaucoup ignorent que les premiers gestes chorégraphiques de la K-Pop étaient confiés à des chorégraphes américains issus du milieu hip-hop : Lyle Benninga, Shane Evaristo, Lando Wilkins, etc. Le résultat ? Des pas, des formations et des attitudes directement issus du hip-hop, même si les interprètes coréens les ont ensuite réappropriés.
Codes empruntés, identité fragmentée
Musicalement, la K-Pop puise dans le hip-hop, le R&B et même le rock. Mais visuellement, elle impose une esthétique qui valorise la peau claire et stérilise les références culturelles. Le paradoxe est fort : s’inspirer d’une culture (souvent noire), tout en effaçant ses protagonistes. Un élément central : le colorisme. En Corée, une peau claire est encore valorisée comme signe de beauté et de statut social. Dans l’industrie, les artistes à peau foncée sont souvent relégués en rôles “exotiques” ou sexualisés. On constate aussi que, bien que très influencée par le hip-hop noir, la K-Pop a souvent évité de réellement intégrer des artistes noirs dans ses grands groupes. L’absence est éloquent : le genre qui danse les codes afro-américains peine à reconnaître leurs auteurs.
Résonance culturelle et critique
La polémique Yseult / DAMDADI illustre parfaitement ce dilemme : qu’est-ce qui distingue l’hommage légitime de l’appropriation abusive ?
Yseult a montré côte à côte les séquences du clip et les images qu’elle accuse d’avoir été copiées, parlant d’une “copie plan par plan”. Le réalisateur a reconnu certaines similitudes, évoqué l’influence, mais le débat reste ouvert. Cette affaire relance une question essentielle : dans la mondialisation de la culture musicale, à qui revient la reconnaissance et comment protéger les créations originales ? La K-Pop ne serait pas ce qu’elle est sans les codes du hip-hop, mais elle est assise sur des tensions culturelles profondes. Elle danse l’héritage noir… tout en l’effaçant trop souvent de son casting. Il est temps d’ouvrir la discussion : célébrer la danse, oui mais avec justice !

